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AGRICULTURE ET ALIMENTATION : LA COMMISSION EUROPÉENNE A L’ÉPREUVE DE LA COHÉRENCE

26 mai 2020

La plateforme Pour une autre PAC, dont fait partie l’UNAF, a souhaité réagir suite à la publication des stratégies « Farm to Fork » et « biodiversité », le 20 mai 2020, deux des volets de son Pacte vert pour l’Europe. Nous notons un grave manque de cohérence entre les intentions politiques affichées au travers de ce Pacte vert et la proposition de réforme de la PAC actuellement négociée.

Les stratégies « Farm to Fork » et « biodiversité » de l’UE mettent en lumière quelques-uns des enjeux majeurs auxquels l’agriculture européenne n’aura d’autre choix que de s’adapter dans la prochaine décennie : meilleure répartition de la valeur au profit des paysan·ne·s, régime alimentaire plus sain, baisse de l’usage des produits de synthèse, diminution des émissions de gaz à effet de serre et de la pression sur les ressources naturelles, etc.

Ces stratégies ont donc le mérite d’esquisser une approche globale des politiques agricoles et alimentaires européennes, mais elles se heurtent à l’immobilisme dessiné pour la réforme de la PAC par la proposition législative en cours de négociation depuis juin 2018. En plus des incohérences de la Commission européenne, les Etats membres ne témoignent d’aucun volontarisme ni à l’égard de la réforme de la PAC, ni pour se saisir du chantier du Pacte vert, et ce malgré les leçons à tirer de l’épisode du Covid-19. Citons quelques exemples de l’inadéquation totale de la réforme proposée pour la PAC à la situation préoccupante dans laquelle se trouve l’agriculture européenne :

  • La souveraineté alimentaire est désormais convoquée de toute part, mais les accords de libre-échange se poursuivent tranquillement aussi bien avec des puissances agricoles productivistes, qu’avec les pays du Sud. Pourtant, ces accords empêchent toute possibilité de mise en place d’une véritable souveraineté alimentaire ; ils ne sont compatibles ni avec la souveraineté des pays du Sud, ni avec celle de l’UE.
  • La Commission affirme que le Pacte vert doit se faire « avec les paysans », dont une grande majorité travaille sur des petites et moyennes fermes. Or, la prochaine PAC ne remet pas en cause l’allocation des aides directes en fonction du nombre d’hectares. Elle n’instaure pas non plus de plafonnement des aides efficace.
  • Si la réduction des pesticides constitue une des pierres angulaires des stratégies « Farm to Fork » et « biodiversité », la PAC post 2020 ne rendrait pas obligatoire pour les Etats membres de soutenir l’agriculture biologique. En parallèle, la Commission suggère une baisse drastique du budget du 2ème pilier de la PAC, qui constitue pourtant l’outil phare de l’accompagnement des agriculteurs dans la transition agroécologique.
  • De même, les stratégies ciblent la baisse de la fertilisation azotée et des antibiotiques en élevage, ou encore l’amélioration du bien-être animal alors que la réforme de la PAC reste absolument muette sur ces priorités.
  • Le Pacte vert a notamment pour vocation de lutter contre le dérèglement climatique. Pourtant, à l’heure actuelle, la proposition législative pour la réforme de la PAC n’est absolument pas à la hauteur de cette bataille climatique, notamment en poursuivant le soutien aux élevages industriels ou en favorisant trop peu les pratiques agricoles les moins émissives de gaz à effet de serre.

La Commission ne peut cantonner ses bribes d’ambition politique à des communications non contraignantes. C’est la PAC qui distribue des milliards d’euros de subventions aux paysan·ne·s et c’est selon elle que les États membres dessinent leurs interventions en matière d’agriculture et d’alimentation. C’est donc la PAC qui doit inclure des objectifs chiffrés contraignants communs à toute l’UE.

L’UE est désormais au pied du mur. Elle peut faire de la prochaine PAC le levier de la transition agroécologique et l’outil au service de la souveraineté alimentaire de l’UE en révisant sérieusement la proposition législative actuellement sur la table. Ou elle peut céder aux appels de l’agro-industrie en poursuivant sur sa lancée et ainsi entériner la mort programmée de la paysannerie européenne comme de celle des pays du Sud, de la biodiversité et de l’Accord de Paris sur le climat.

L’UNAF, via la plateforme Pour une autre PAC , a depuis longtemps choisi son camp : celui d’une refonte de la PAC dès la prochaine programmation . C’est pourquoi nous demandons aux décideurs politiques français de peser de tout leur poids dans les négociations européennes pour obtenir une PAC à la hauteur des nécessaires reconstruction et réorientation du système agricole et alimentaire européen.

Pour en savoir plus

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